Le Monde est à toi de Romain Gavras
Illustration de Gilles Rochier©
François est un honnête dealer de cité sur le point de passer au légal. Il a décidé de se reconvertir en M. Freeze Maghreb, un marché porteur. Pour conclure ce deal-là, il lui faut récupérer ses économies. Sauf que… Danny sa mère a tout craqué. Nerf de la guerre et fil conducteur du scénario, l’argent du Teusch justifie le voyage au soleil de Bénidorm (Espagne), l’immense cité à touristes en bord de mer. Dans le monde des affaires, on commence par les projets licites avant de basculer dans les combines pour s’enrichir, dans Le Monde est à toi, François sort du trafic « un 50 E et un bingo » pour retrouver le chemin de la libre entreprise.
La Haine de M. Kassovitz, 20 ans plus tard, avec l’excellent Vincent Cassel en guise de lien. À ce film coup de poing à l’époque (1995) succède un état des lieux de la Cité, au centre de laquelle la consommation de haschich, activité génératrice d’argent, d’espoir et de rêve d’ailleurs, s’est institutionnalisée. Moins politisé que son prédécesseur, plus réaliste sans couler dans le cliché pathos de la banlieue morose, Le Monde est à toi est dynamique sans être speed, violent sans être gore, réaliste et teinté d’humour. François [Karim Leklou] sous des dehors de Bernard Blier sentimental tente de couper le lien avec la vénéneuse Danny [Isabelle Adjani] la mère possessive, manipulatrice et délinquante. Henry [Vincent Cassel] en père de substitution, découvrant les illuminatis tout au long de l’histoire avant de recevoir la Vérité, bloque les flancs et apporte une touche d’absurde. Poutine [Sofian Khammes] le boss caninophile et sa bande de sbires sous sheet mettent la pression à coups de kalach’. Philippe Katherine en avocat du milieu et François Damiens en gangster retraité complètent ce casting branquignol à souhait. Ne manque que l’amour avec la jeune Lamya [Oulaya Amamra], semilla d’un bonheur possible dans cet univers de Vis-ta-vie privé d’avenir et dopé au teusch.
Lâche l’affaire, quitte ta Reum et vogue au vent : Le Monde est à toi…